Résumé :

Au bout du monde, juste avant le désert et la mer, à l’extrême Sud du Chili sur une terre désolée, se trouve la ferme des Poloverdo. C’est la destination que s’est fixé Angel Allegria. Cet assassin qui fuit le monde et les hommes trouve refuge dans la ferme de ces pauvres paysans qu’il élimine sans remords. C’est alors que Paolo, leur fils, rejoint la maison. Angel qui n’a encore jamais tué d’enfant décide d’épargner le petit. Commence alors entre les deux personnages une relation étrange qui  va bouleverser radicalement le cours de leurs existences.

Extrait :

Tandis que le poulet commençait à rôtir sur sa broche et que son parfum se répandait dans la maison, Luis se mit à lire. Angel alla se planter devant la fenêtre, les mains enfoncées dans ses poches, écoutant les mots crépiter en même temps que le feu et la graisse de l’animal, qui gouttait sur les bûches. Cela parlait de navigateurs des temps anciens, rejetés à terre comme des paquets de varech, ivres d’avoir vu mourir tant d’hommes au milieu des tempêtes. Cela parlait des choses de la nature et des choses du cœur, avec simplicité et courage. Et, tout en regardant la pluie battre le carreau, Angel se laissait bercer par les mots des poèmes, surpris de les comprendre sans effort. Ces mots se frayaient un chemin dans son cerveau étriqué ; c’était comme une eau puissante qui irriguait son corps, repoussant peu à peu les petits cailloux, les mottes de terre, comme lorsqu’il arrosait le potager. C’était étrange et apaisant.
A dater de ce jour, l’enfant et les deux hommes vécurent ensemble dans la maison. Chaque soir, Luis ouvrait le livre et lisait à voix haute dans les vapeurs de la soupe. Chaque soir, Angel se tenait devant la fenêtre pour que les deux autres ne voient pas les larmes, les larmes qui mouillaient ses yeux d’assassin.

Avis :

Je peux remercier le libraire de Voyelles qui a été de très bon conseil puisqu’il m’a permis de découvrir ce petit bijou de la littérature jeunesse. Ce roman s’adresse toutefois à un public assez mûr puisque son sujet n’est pas des plus légers. Mais c’est avec beaucoup de talent qu’Anne-Laure Bondoux aborde des sujets profonds et universels dans un livre qui vaut largement la réflexion de certains romans plus “adultes”. Le personnage d’Angel est plus complexe et plus attachant qu’il n’y paraît : il change profondément au contact de Paolo. Le rapport au monde et aux autres des deux personnages est traité avec beaucoup d’intelligence et de subtilité. La quête des deux héros est semée d’embûches qui donnent à leurs aventures toute la beauté et toute l’intensité de la vie dans ce qu’elle a de plus précieux mais aussi de plus fragile. Une réflexion aboutie, une bonne dose de poésie et la douceur du bonheur qui affleure par moments font de ce roman un petit chef d’œuvre d’émotion. A découvrir absolument !

Vous pouvez trouver des compléments d’information sur le livre sur le site de l’auteur.
Clochette a beaucoup aimé cette histoire hors du commun et originale. Katell conseille aussi cette lecture qui vous happe et ne vous lâche qu’à la dernière phrase.

Note :

Anne-Laure Bondoux (1971) – Française
227 pages – 2003 – ISBN : 2-7470-0775-8