Carlos Ruiz Zafon – Le jeu de l’ange
Résumé :
Dans la Barcelone des années 20, David Martin est bien décidé à vivre de sa plume à tout prix. Mais celui qu’il va devoir payer pour aller au bout de ses rêves est très élevé. D’abord exploité par deux éditeurs pour qui il écrit des romans-feuilletons publiés sous le pseudonyme d’Ignatius Samson, il doit aussi faire face à une vie affective tourmentée et à de graves soucis de santé jusqu’au jour où un mystérieux éditeur, Andreas Corelli, entre en contact avec lui et lui fait une proposition tout aussi étrange que tentante.
Extrait :
-Oubliez cette maison. C’est un lieu maudit.
-Malheureusement, c’est impossible. Je l’habite.
Madame Marlasca fronça les sourcils.
-Je croyais que personne ne voulait y vivre. Elle est restée vide pendant des années.
-je l’ai louée il y a déjà longtemps. La raison de ma visite est qu’au cours des travaux de rénovation, j’ai trouvé une série d’effets personnels dont je crois qu’ils appartenaient à votre défunt mari et, je suppose, à vous-même.
-Il n’y avait rien à moi dans cette maison. Ce que vous avez trouvé doit être à cette femme…
-Irene Sabino ?
Alicia Marlasca eut un sourire amer.
-Que voulez-vous réellement savoir, monsieur Martin ? Dites-moi la vérité. Vous n’êtes pas venu ici dans le seul but de me rendre de vieilles affaires de feu mon mari.
Nous nous dévisageâmes en silence, et je sus qu’à aucun prix je ne pouvais ni ne voulais mentir à cette femme.
-J’essaye de comprendre ce qui s’est passé dans cette maison, madame Marlasca.
-Pourquoi ?
-Parce que je crois qu’il m’arrive la même chose.
Avis :
C’était impossible de faire un résumé de ce livre et je suis peu satisfaite de celui qui est ci-dessus, où j’en dis trop en même temps que je ne dis pas l’essentiel, mais passons. Le Jeu de l’ange est un ouvrage à peu près irrésumable, qui lui-même en dit trop et pas assez. Je me suis laissée happer dans la pittoresque Barcelone de l’auteur qui enchaîne avec plus ou moins de brio les changements de style. Le livre puise dans le mythe de Faust, emprunte à la veine gothique jusqu’à se complaire parfois dans des invraisemblances un peu indigestes, le fantastique règne bientôt en maître tandis que le livre met l’accent sur la destinée tragique du personnage principal en passant aussi par le roman policier ; le tout étant martelé par l’idée d’un amour jamais démenti pour l’écriture et les livres. En bref, ce pandémonium littéraire tourne par moments au joyeux bordel (même si en l’occurrence, le bordel a plutôt ici vocation à effrayer), surtout qu’il a tendance à accumuler les énigmes et ne prend pas vraiment le temps de toutes les dénouer. Je me rends compte que j’émets beaucoup de réserves et pourtant : malgré les tics d’une écriture romanesque par moments trop classique et les changements abrupts de rythmes dans la narration, la magie opère. On se retrouve irrémédiablement hypnotisé par le talent du conteur dont la virtuosité nous prend au piège : j’ai trouvé que l’écriture ne cessait de gagner en intensité jusqu’à la maestria des dernières pages qui, finalement, nous fait regretter que la fin arrive si vite. En outre, certains passages sont vraiment effrayants et présentent un suspense tout à fait maîtrisé tandis que d’autres sont profondément touchants et sonnent très juste – ils contrastent avec d’autres, tantôt trop prévisibles, tantôt maladroits.
Lourd d’un héritage littéraire écrasant, Le Jeu de l’ange sait toutefois tirer son épingle du jeu et réussit à faire naître de la polyphonie une œuvre originale et terriblement prenante dont je ne peux que vous recommander la lecture, ne serait-ce que pour ses très beaux passages entre Isabella et David, dont les rapports sont à mes yeux ceux qui sont construits avec le plus de brio.
Note :
Carlos Ruiz Zafon (1964) – Espagnol
537 pages – 2009 – ISBN : 978-2-298-02619-1
octobre 15th, 2009 à 11:16
Malgré les petits défauts, une œuvre à découvrir.
Il faut d’abord que je lise son premier …
Dis-moi, tu fais partie du jury pour les chroniques de la rentrée ? On risque de se voir !
octobre 15th, 2009 à 14:35
C’est quoi ce jury des chroniques de la rentrée ? Nous ne sommes pas au courant donc je doute que nous en fassions partie
octobre 15th, 2009 à 19:37
@ Antoine : je te rappelle que tu as participé aux Chroniques de la rentrée littéraire à deux reprises, poisson rouge ! Et après avoir jeté un oeil sur le site, voilà qui devrait t’intéresser :
http://chroniquesdelarentreelitteraire.com/prix
J’imagine que c’est ce dont parle Leiloona.
@ Leiloona : Comme je l’ai dit au-dessus, c’est Antoine qui a participé aux Chroniques mais en revanche, il ne fait pas partie du jury (ou bien il me fait des cachotteries^^).
J’avais lu le premier livre de Carlos Ruiz Zafon quand il était sorti, cela fait donc quelques années et j’avoue ne pas vraiment m’en rappeler (le livre m’avait enthousiasmée mais je n’ai plus forcément les mêmes attentes aujourd’hui en matière de livres).Et effectivement, au-delà de ses défauts, ça reste à mes yeux un livre qui vaut le coup d’oeil. Mêmes ses maladresses ont quelque chose de touchant et le tout a beau être hétérogène, le livre ne manques pas de qualités.
octobre 15th, 2009 à 20:40
Je comprends mieux. Effectivement je me souviens maintenant avoir reçu un mail de Ulike il y a déjà quelques semaines expliquant le principe de ce vote. Ayant pas mal de choses à faire à l’époque je n’avais prêté qu’un œil discret à cette annonce.
En tout cas je me rendrai sans doute à cette remise des prix histoire de rencontrer d’autres blogeurs, ce sera intéressant :
octobre 16th, 2009 à 22:06
Il faut, moi aussi, que je lise d’abord son premier !
octobre 17th, 2009 à 11:01
Ah ! Mince alors ! L’organisatrice m’a dit que tu faisais partie du jury !
Bon, on se verra peut-être lors de cette remise de prix. Ce serait sympa de se parler en vrai. )
octobre 17th, 2009 à 13:40
Soit j’ai zappé un mail soit je n’ai pas été contacté mais à priori non je n’en fait pas partie. Je ne suis pas un blogueur suffisamment influent encore !
Je pense en effet qu’on se verra lors de la remise des prix, le passage “en vrai” est toujours très intéressant.
octobre 19th, 2009 à 8:02
J’ai commencé juste hier soir L’ombre du vent… Je pense que je lirai Le jeu de l’ange en suivant !
octobre 20th, 2009 à 23:05
L’ombre du vent, un de mes livre préféré! Je te le conseille vivement Antoine!
octobre 20th, 2009 à 23:07
On aura biensur rajouté le “s” à livre …
novembre 7th, 2009 à 11:18
Malgré les commentaires enthousiastes je ne suis jamais parvenue à lire “l’ombre du vent”, ce n’est pas que je n’aime pas mais j’oublie à chaque fois de continuer la lecture. Celui-ci semble aussi avoir beaucoup plu, peut-être m’accrochera-t-il davantage !
janvier 17th, 2010 à 15:48
Un livre que je lorgne du coin de l’oeil depuis un bon moment.
En lisant la critique de Violaine (le début), je me suis dit: “ah bon? Un imbroglio, un “joyeux bordel…”, mince.
Puis arrivée au bout, j’ai finalement été confortée dans mon envie de lire cet ouvrage tout en étant (si possible) encore plus intriguée qu’auparavant.
Bref, à rajouter au panier, la critique ayant achevé de me décider. En revanche, j’attendrai la sortie en poche car ce n’est pas du petit volume, et que la bibliothèque crie à l’enclume.
janvier 17th, 2010 à 22:04
Ce qui est bien, c’est que ma critique reflète la réalité de mon indécision ; mais effectivement, c’est un bon livre lorsqu’on éprouve le besoin de s’évader et de se laisser envoûter par une histoire, sans pour autant se prendre la tête.
mai 12th, 2010 à 21:07
Je viens d’achever Le jeu de l’ange et même s’il m’a plu, je lui ai préféré l’Ombre du vent. Contrairement à toi, mon intérêt a faibli sur la fin.