Résumé :

Le récit s’ouvre sur la décision du roi Arthur d’organiser la chasse au blanc cerf. Alors qu’il tient compagnie à la reine Guenièvre, Erec, un jeune et preux chevalier, subit un affront de la part d’un nain hostile. Celui-ci est accompagné d’un chevalier et d’une demoiselle. Pour venger son honneur, Erec se lance à la poursuite du trio et arrive dans un bourg où il reçoit l’hospitalité d’un vavasseur. Il s’éprend alors de la fille de celui-ci dont il demande la main. Alors qu’il a vaincu le chevalier (du trio précédemment nommé) en lui ravissant l’épervier, Erec emmène celle qui va devenir sa femme à la cour du roi Arthur pour que soit célébré le mariage. Si ces aventures semblent s’ouvrir sous les meilleurs auspices, Erec qui aime un peu trop sa femme, est accusé de recréantise (c’est-à-dire qu’il passe son temps à batifoler avec sa belle et ne remplit plus son devoir de chevalier, à savoir montrer sa prouesse guerrière). Il va donc devoir défendre son honneur : c’est là que les véritables aventures vont pour lui commencer…

Extrait :

(je ne résiste pas à vous livrer un extrait de la description de la nuit de noces d’Erec et Enide, parce que c’est délicieusement licencieux par rapport à ce qu’on pourrait attendre de la littérature de l’époque^^)

Très grande fut la joie dans le palais mais j’en laisse de côté le surplus : vous entendrez maintenant la joie et le plaisir qu’il y eut dans la chambre et dans le lit. Cette nuit-là, quand ils vinrent au moment de s’unir, les évêques et archevêques furent présents. Pour cette première nuit, Enide ne fut pas mise à l’écart et Brangien (cf. Tristan et Yseult) ne lui fut pas substituée. la reine s’était occupée elle-même de tout préparer parce qu’elle les aimait beaucoup l’un et l’autre. Le cerf  traqué qui halète de soif ne désire pas tant la fontaine, et l’épervier, quand il a faim, n’accourt pas si volontiers à l’appel qu’ils n’étaient heureux de voir approcher le moment où ils allaient reposer dans les bras l’un de l’autre. Cette nuit-là, ils ont bien rattrapé le temps qu’ils avaient perdu à attendre. (…) L’amour qui régnait entre eux rendit la pucelle plus hardie : elle ne s’effaroucha de rien, supporta tout, quoi qu’il lui en coutât. Avant de sortir du lit, elle avait perdu le nom de pucelle : au matin, il y avait une dame de plus.

(traduction de René Louis, 1953)

Avis :

Les romans de Chrétien de Troyes ont cette particularité qu’ils nous transportent véritablement dans un autre monde : non seulement parce que la façon d’écrire des romans a bien changé depuis plus de 800 ans, mais aussi parce que l’univers arthurien nous convie dans un espace aux confins du merveilleux. Du coup, et c’est un peu dommage, la littérature médiévale prend souvent des allures de parodie pour un lecteur contemporain tant ce qu’on considère aujourd’hui comme des clichés y règne comme norme.
Mais ce qui est sûr, c’est que même si les aventures sont assez schématiques et plus ou moins attendues, Chrétien a l’air de lui aussi bien s’amuser, ce qui se révèle finalement contagieux. J’ai la chance d’étudier ce livre cette année et il s’avère receler plus de modernité qu’il n’en montre au premier abord, notamment dans la description des rapports homme-femme et de l’incompréhension qui résulte bien souvent de difficultés de communication. Un livre qui vaut donc le coup d’oeil, ne serait-ce que pour le côté merveilleusement dépaysant de la littérature médiévale.

Note :
Chrétien de Troyes (vers 1135-1183) – Français
182 pages – 1982 – ISBN : 978-2-7453-1954-8