Paul Eluard – Capitale de la douleur
Extraits :
Revenir dans une ville de velours et de porcelaine, les fenêtres seront des vases où les fleurs, qui auront quitté la terre, montreront la lumière telle qu’elle est.
Voir le silence, lui donner un baiser sur les lèvres et les toits de la ville seront de beaux oiseaux mélancoliques aux ailes décharnées.
Ne plus aimer que la douceur et l’immobilité à l’œil de plâtre, au front de nacre, à l’œil absent, au front vivant, aux mains qui, sans se fermer, gardent tout sur leurs balances, les plus justes du monde, invariables, toujours exactes.
Le cœur de l’homme ne rougira plus, il ne se perdra plus, je reviens de moi-même, de toute éternité.
(tiré de Capitale de la douleur)
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XXII
Le front aux vitres comme font les veilleurs de chagrin
Ciel dont j’ai dépassé la nuit
Plaines toutes petites dans mes mains ouvertes
Dans leur double horizon inerte indifférent
Le front aux vitres comme font les veilleurs de chagrin
Je te cherche par-delà l’attente
Par-delà moi-même
Et je ne sais plus tant je t’aime
Lequel de nous deux est absent.
(tiré de « Premièrement », dans L’amour, la poésie)
Avis :
Un recueil que j’avais déjà lu il y a quelques temps et que j’ai pris plaisir à relire. Eluard est un surréaliste, ce qui fait que sa poésie ne se donne pas d’emblée : on ressent à la fois une certaine fascination pour ce langage qui crée des images improbables avec du connu, tout en éprouvant parfois de la difficulté à entrer dans quelques textes assez obscurs. Certaines formules d’Eluard sont passées à la postérité : « La terre est bleue comme une orange », ou encore « La courbe de tes yeux fait le tour de mon cœur ». Pour moi, ce qui fait la magie de ce poète, c’est son talent à décrire l’amour, non pas (comme souvent) en lien étroit avec la souffrance ; il s’agit ici au contraire d’une pure célébration d’où ressort un sentiment de perfection. C’est aussi pour cela que j’ai préféré le second recueil L’amour, la poésie, dédié à Gala (sa femme à l’époque, qui plus tard deviendra la muse et la compagne de Salvador Dali). Le premier contient un certain nombre de textes dédiés à ses amis du groupe surréaliste : écrivains (André Breton, Philippe Soupault) ou peintres (Max Ernst, George Braque) mais qui restent assez hermétiques.
Note :
Paul Eluard (1895-1952) – Français
237 pages – 1926, 1929 – ISBN : 2-07-030095-1
novembre 25th, 2008 à 21:31
Les poésies surréalistes, les artistes surréalistes en général, me fascinent vraiment…