Véronique Ovaldé – Ce que je sais de Vera Candida
Résumé :
Après avoir gagné sa vie durant de longues années comme prostituée, Rose Bustamente décide de prendre sa retraite vers la quarantaine pour se lancer dans une nouvelle activité : la pêche aux poissons volants. Jusqu’au jour où Jeronimo vient rompre sa tranquillité : il souhaite construite une villa sur la colline mais la cabane de Rose gâche sa vue sur la mer. Du moins c’est ainsi que commence l’histoire de Rose telle qu’elle la raconte à Vera Candida, sa petite fille…
Extrait :
L’arithmétique
Pendant des années, quand Monica Rose s’assoirait sur le canapé entre Vera Candida et Itxaga, elle se serrerait contr eux, bougerait son minicul comme si elle se faisait un nid, les prendrait par le bras et dirait, On est bien tous les deux.
La première fois, Vera Candida rectifierait, On n’est pas deux, on est trois.
Et Monica Rose répondrait, On est bien quand même.
Avis :
C’est avec plaisir que je me suis plongée de nouveau dans le style inimitable de Véronique Ovaldé qui s’attaque cette fois-ci à la cause féminine, mais d’une façon tout à fait originale. Les femmes qui peuplent ce livre sont des personnages fascinants, fortes et fragiles à la fois, elles se sortent de situations souvent tragiques avec un courage qui confine parfois à l’insouciance. Cela fait que ce livre ne ressemble à nul autre : le cadre de l’île de Vatapuna rappelle vaguement l’Amérique latine mais nous sommes pourtant dans un espace singulier, paradoxal, où les femmes semblent mener leur monde mais sont pourtant les victimes d’hommes malveillants. Les drames restent sous-jacents puisque la force d’avancer qui meut les personnages semble inaltérable. Rose Bustamente et Vera Candida sont deux héroïnes épatantes. Il subsiste quelque chose de profondément déconcertant dans l’écriture de Véronique Ovaldé : cette façon de refuser une intériorité traditionnelle à ses personnages nous les rend bizarrement touchants mais j’ai aussi du mal à cerner cette démission face au devenir de ses personnages que j’ai ressentie vers la fin du livre (et qui n’est pas sans faire écho à ce relâchement qui m’avait un peu gênée dans Et mon coeur transparent). On reste donc un peu sur sa fin mais la magie poétique fait effet et le livre reste tout de même à mes yeux plus suivi que le précédent. A lire donc, pour une chouette expérience littéraire !
Note :
Prix Renaudot des Lycéens 2009
Véronique Ovaldé (1972) – Française
293 pages – 2009 – ISBN : 978-2-298-02616-0
octobre 29th, 2009 à 1:49
Je partage ta note !
C’était la première fois que je lisais cet auteur, et j’ai vraiment bien aimé. Je l’ai fini il y a deux jours. Ma note est donc toute récente.
Cela dit, la fin n’est pas non plus une démission de tous les personnages. Vera retourne au pays, mais pour y trouver quelque chose, pas pour baisser les bras, selon moi.
octobre 29th, 2009 à 23:03
Ce livre est déjà noté dans ma liste. Ton billet me confirme que ce roman est à lire absolument !
octobre 31st, 2009 à 19:39
Encore un avis positif sur ce livre…. Il va décidément falloir que je le lise.
décembre 21st, 2009 à 20:49
[...] Je suis plus que mitigée pour ma part. Et les critiques élogieuses que j’ai pu lire ou entendre dans la presse renforcent mon incrédulité. Ce n’est pas que ce soit mal écrit et le début est plutôt encourageant : la première histoire réussit à créer un monde dense, par moments à la limite du fantastique, dont on découvre les recoins progressivement, et par petites touches qui font mouche. La seconde est la plus longue et la moins digeste puisque les atermoiements du protagoniste donnent envie de lui arracher la langue (au moins comme ça, il arrêterait de nous pourrir la vie avec ses “regardez comme je suis malheureux dans ma vie parce que je suis un raté mais reconnaissez que je ne suis pas aidé avec mon passé pourri que je vais me faire un malin plaisir de vous raconter”) entre des accents de narcissisme et de larmoiements qui m’ont rappelé de pénibles souvenirs. La troisième est moins insupportable mais pas vraiment inoubliable. Les accents de tragique qui nimbent parfois l’écriture de Marie NDiaye d’une profondeur universelle sont malheureusement le plus souvent le signe d’une certaine lourdeur et on regrette que ça ne décolle pas (surtout après un début prometteur). De plus, hormis de vagues échos entre les histoires, je n’ai guère trouvé de véritable cohérence au roman, alors qu’il y avait de quoi faire mieux ficelé et les récits se faisant écho auraient eu tout à y gagner niveau intensité. Le style de Marie NDiaye est bien souvent lourd (et les phrases de plus d’une page, quand elles ne sont pas somptueusement écrites, me sortent par les yeux) et elle cisèle tellement ses personnages qu’on se sent totalement écrasé par la focalisation interne (et ce, d’autant plus que lesdits personnages ne sont pas attachants – Nora exceptée). Quant au titre, plus j’y pense et plus je le ressens comme ironique ; et puis, il y a une forme d’artificialité dans le consensus qui existe autour de ce livre qui attise ma méfiance. Alex a préféré la première histoire comme moi mais dans l’ensemble a plutôt apprécié l’écriture de Marie NDiaye. Amanda Meyre est à peu près aussi perplexe que moi, même si son coup de coeur va à la troisième histoire. Je rejoins l’avis de La Meuf qui m’a troublé puisqu’en le lisant, je me suis rendue compte qu’on partageait à peu près rigoureusement le même point de vue sur le livre (mais son article est bien plus drôle que le mien). Quant au fait de lui avoir attribué le Goncourt, j’en connais deux qui l’auraient plus amplement mérité : Jan Karski ou Ce que je sais de Vera Candida. [...]
février 24th, 2010 à 9:33
je partage tout à fait ton avis sur ce livre sauf la fin du billet sa rencontre avec le journaliste est pleine d’espoir et même si elle doit mourir elle est parvenue à changer son destin et ce n’était vraiment pas gagné d’avance !!! j’espère que tu me fera une petite visite A bientôt