Résumé :

Sur le même mode de fonctionnement que dans Journal du dehors, Annie Ernaux retranscrit des instants de vie, des scènes puisées dans l’observation du quotidien de tous les jours en les ponctuant de réflexions sur les rapports que peuvent entretenir le réel et la fiction.

Extraits :

Les chansons transforment la vie en roman. Elles rendent belles  et lointaines les choses qu’on a vécues. C’est de cette beauté que vient plus tard la douleur de les entendre.

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Aujourd’hui, pendant quelques minutes, j’ai essayé de voir tous les gens que je croisais, tous inconnus. Il me semblait que leur existence, par l’observation détaillée de leur personne, me devenait subitement très proche, comme si je les touchais. Si je poursuivais une telle expérience, ma vision du monde et de moi-même s’en trouverait radicalement changée. Peut-être n’aurais-je plus de moi.

Avis :

Ce livre, qui est en quelque sorte la suite chronologique du précédent, m’a permis d’apprécier plus pleinement la démarche d’Annie Ernaux. Elle a su retranscrire avec beaucoup de vérité les passerelles qui se créent en nous, le plus souvent inconsciemment, entre le réel et la fiction. Pour l’auteur, la vie est un roman, dans le sens où c’est sur ce mode que (même malgré nous) nous l’appréhendons. Ainsi chaque souvenir reconstitué a posteriori dans l’esprit prend les allures d’une scène de cinéma. De plus, ce livre regorge d’observations piquantes, pertinentes et sans concession sur la société dans laquelle on vit. A mes yeux, il remplit parfaitement le rôle que j’imagine être assigné à la littérature : faire trembler nos visions du monde et rendre notre regard sur les choses plus acéré afin de tirer de l’observation du réel des vérités qui, si elles n’aident pas à mieux vivre, du moins nous permettent de mieux nous situer au sein de l’existence qui est la nôtre.

Note :

Annie Ernaux (1940) – Française
147 pages -  1993-1999  – ISBN : 2-07-041922-3