Résumé :

Une famille voit son destin changer au cours de trois étés à dix ans d’intervalle. Autour de Susan, la mère qui espère mettre fin à ses jours, son mari et son frère, ainsi que ses trois enfants qui présentent chacun un été. Ils expriment leurs doutes, leurs peines et leurs malaises dans cette famille déchirée mais malgré tout assez solidaire. Une famille qui pourrait ressembler à beaucoup d’autres.

Extrait :

Je suis persuadée que maman regrette de ne pas nous avoir abandonnés et d’être restée piégée au milieu des deux frères. Je l’imagine, se retournant et prenant acte de ces années passées : tout est joué, la donne ne changera plus. Elle comprend que tout est derrière. Devant : le déroulé attendu de ce qu’elle ne connaît que trop. Les années ont passé, différant chaque jour cette vie qu’elle s’était promise, autre. Je suis sûre que maman s’est vue mille fois quitter la maison. Maintenant, assignée à résidence avec son jeune enfant, dernier barreau de sa prison, il ne lui reste plus que le trajet qui la reconduit à sa chambre. Maman se réfugie dans l’oubli fugitif que le vin ou le bruit de la mer lui procurent. Puis c’est la demi-obscurité de sa chambre. Avant d’éteindre, elle observe le papier peint, les fleurs mordorées sur les rideaux, tout ce qu’elle a pris soin de choisir. elle évoque souvent devant nous la joie immense qu’elle a ressentie lorsque papa et Remo sont devenus acquéreurs de La Viguière, et son entrain lorsqu’il s’est agi de décorer la maison. Savait-elle à l’époque qu’elle trouvait là l’oubli nécessaire pour ne pas songer à tout ce qu’elle n’a pas choisi ou seulement par défaut ? L’image devant elle devient floue. Peut-être préfèrerait-elle pleurer ? Mais ses yeux restent secs. L’effroi étrangement calme que lui inspire son existence est exempt de toute émotion, de tout débordement possible. Elle a ce regard fixe que je connais bien maintenant – celui d’une femme qui a définitivement disparu de sa vie.

Avis :

Dans les dernières 24h j’ai vraiment été absorbé par ce livre, espérant presque que la grève de la RATP se fasse un peu plus sentir afin d’arriver plus tard au boulot et ainsi avoir le temps d’avancer dans cette lecture. Grève ou non, j’ai bien sûr fini ma lecture aujourd’hui, regrettant d’arriver sur la dernière page tellement j’aurais aimé en savoir plus sur cette famille inventée par Arnaud Cathrine.
Je dois avouer qu’au début j’ai eu peur, je craignais une énième histoire “bateau” sur une famille en crise mais heureusement on passe à côté des clichés. A travers 3 chapitres, 3 enfants parlent à tour de rôle de 3 étés où leur vie a changée, où l’absence d’une mère est insupportable et où trouver une place dans ce monde avec le poids de cette absence n’est pas chose aisée. On se lie très rapidement aux personnages, on apprend à les connaître et presque à partager leurs vies comme si chacun d’eux portait un peu de nous (en tout cas de moi !).
Tout est là : un style très agréable, une histoire intéressante, et des personnages auxquels on s’attache sans soucis. C’est un très beau livre, ne passez pas à côté !

Note :

Arnaud Cathrine (1973) – Français
241 pages – 2005 – ISBN : 978-2-07-034447-5