Marie Nimier – La Reine du silence
Résumé :
Marie Nimier revient dans ce livre sur la figure de son père, Roger Nimier, qui s’est tué dans un accident de voiture en 1962 quand elle avait cinq ans. Entre le mythe élaboré par les autres autour de l’écrivain et ses bribes de souvenirs de fillette, elle doit composer avec une ombre inquiétante et insaisissable, celle d’un père distant et souvent absent, peu enclin à accorder de l’attention à l’enfant qu’elle était.
Extrait :
Je n’ai gardé de lui que quelques souvenirs, bien peu en vérité. Je me tourne vers ses amis. Ce qu’ils ont dit, ce qu’ils ont publié, les rumeurs qu’ils ont colportées. Drôle de façon de voir son père. De le rencontrer. On le décrit tour à tour et parfois simultanément comme un être désinvolte, sérieux, menteur, loyal, lent, rapide, travailleur, paresseux, cynique, patriote, cruel, tendre, indifférent, passionné, grave, frivole, ponctuel, généreux et malhabile de ses sentiments comme on est maladroit de ses mains. J’ajouterais qu’il fut aussi journaliste, rédacteur en chef, scénariste et, jusqu’à sa mort, conseiller littéraire chez Gallimard – c’est ainsi qu’il fit la connaissance de Sunsiaré de Larcône, alias Suzy Durupt, auteur de La messagère et de quelques romans inédits. Je dirais aussi qu’il eut trois enfants dont le premier, Guillaume, mourut à la naissance, ce qui conditionnerait toute la suite du récit. Je parlerais de Martin, de dix-huit mois mon aîné, de Hugues aussi, mon demi-frère né d’un premier mariage de ma mère. Je m’aventurerais à raconter ces anecdotes qui émaillent la légende paternelle, les connues et les moins connues. Je gratterais un peu, allant jusqu’à retrouver dans la correspondance privée quelques aventures lourdes de sens qui donneraient un éclairage nouveau sur le personnage. Et je mettrais le tout à la poubelle.
Ou alors, je commencerai par une visite au cimetière de Saint-Brieuc. Ma première visite, il y a trois ans. J’écrirai qu’au début il y a beaucoup de pierres, et des arbres, beaucoup aussi. Beaucoup de tombes alignées comme les petits lits d’un dortoir en plein air. Au début on se dit, oui, c’est la première chose qui m’est venue à l’esprit en arrivant au cimetière : ils sont bien, là, avec la mer en contrebas. Il est bien là.
Avis :
Ce livre relève d’une démarche psychanalytique puisque Marie Nimier s’attache à lever le voile sur la figure paternelle, non pas dans l’optique de déballer son linge sale, mais bien pour apprendre à vivre avec ce qui constitue son histoire, avec les vieux démons qui la hantent et en même temps pour une raison simple et essentielle : parce qu’elle a besoin de trouver sa place dans le monde. Cette démarche humble et personnelle est touchante et m’a donné envie de découvrir Marie Nimier romancière.
Note :
Marie Nimier (1957) – Française
203 pages – 2004 – ISBN : 978-2-07-032084-4
août 17th, 2011 à 8:13
Lu et beaucoup, beaucoup aimé !
août 20th, 2011 à 11:16
Un autre style de reine, je ne l’ai pas lu celui ci, je prends note!
août 22nd, 2011 à 13:36
Clara : tu as lu d’autres livres de cette auteure ?
Métaphore : effectivement, c’est un style très différent d’Alan Bennett, mais qui vaut tout autant la peine qu’on s’y arrête