Résumé :

Dan s’est installé avec ses parents et ses oncles sur un terrain vague en bordure du périphérique. Alors que leur cirque tombe en ruine, le père perd tout son argent aux jeux et Dan erre souvent seul et livré à lui-même. Le seul être auprès duquel il trouve du réconfort est Tamya, sa guenon. Il n’a qu’un rêve, comme une idée fixe se détachant sur l’horizon gris de son existence : aller voir la mer.

Extrait :

Mam’, elle est dans mon soleil, ses jambes plantées dans sa jupe à volants.
Avec son pied elle me pousse et se couche sur le carton. Respirer avec Mam’, c’est mieux que tout. L’odeur de la terre, de l’essence, les pneus brûlés.
Quand Mam’ a bien respiré, elle étouffe d’amour. Elle me prend contre elle.
-Mon fils, ma vie.
Elle m’écrase.
Les camions klaxonnent parce qu’ils voient les cuisses de Mam’, sa jupe relevée. Ils voient sa beauté.
Je crois que si je ne bouge pas, rien ne changera. Que Mam’ ne s’en ira jamais.
Je crois aussi que quand on aime les gens, ils finissent par nous aimer.
-Foutaise ! elle dit Mam’.
Elle se lève, elle secoue sa jupe, ses cheveux.
-Tu pues !
Je sais. C’est la guenon. A force de dormir avec elle, je prends son odeur.
-Il faudrait voir à te laver.
Je ne réponds pas. Je baisse les yeux.

Avis :

J’ai mis un moment à entrer dans ce livre, peut-être parce qu’il parle d’un univers qui m’est totalement étranger, peut-être aussi à cause de son style parfois trop dépouillé. J’avais pourtant adoré Dans l’or du temps ; je ne peux pas dire que je n’ai pas aimé celui-ci, mais je l’ai trouvé nettement plus âpre. Le narrateur est le jeune Dan : on voit donc le monde à travers ses yeux et c’est très difficile de s’identifier à lui car il porte sur les choses un regard extrêmement singulier (j’ai d’ailleurs pensé qu’il était probablement autiste même si rien n’est dit à ce propos dans le livre). Sa vie est faite essentiellement de solitude et de violence : on a l’impression qu’il se heurte continuellement au monde, un monde dans lequel il peine à trouver ses repères et qui se dissout petit à petit en même temps que l’existence de la famille Pazzati se délite. Il y a pourtant des moments de poésie brute qui ressortent dans cette façon si particulière qu’a Dan de s’exprimer, dans la simplicité empreinte d’acuité de son regard. Au fil de ma lecture, je n’ai cessé d’osciller entre deux sentiments : dégoût et empathie. J’en ressors donc assez secouée et je m’étonne qu’à l’origine ce livre soit paru dans une édition jeunesse car il reste à mes yeux extrêmement glauque. Mais ça me donne envie de continuer à découvrir les livres de Claudie Gallay dont l’écriture ne me laisse définitivement pas indifférente.

A propos de livres a beaucoup aimé ce roman malgré son côté sombre.

Note :

Claudie Gallay (1961) – Française
297 pages – 2002 – ISBN : 978-2-7609-2969-2