Résumé :

Un soir où il se rend à Paranoid Park, un jeune skater se laisse entraîner à aller « brûler un dur », ce qui revient à grimper dans un train en cours de marche quand celui-ci roule à faible allure. C’est alors qu’un agent de sécurité armé d’une matraque le repère. Pris de panique, il assène un coup de sa planche sur le crâne de l’officier qui titube avant de finir écrasé sous le train. Il n’y a aucun témoin si ce n’est le jeune qui l’a entraîné dans cette aventure, mais ce dernier s’enfuit. Pris de panique, le garçon décide de garder le secret de cette aventure pour lui ; mais c’est sans compter le choc de l’événement, la culpabilité et les images obsédantes qui le hantent.

Extrait :

Qu’est-ce qui déconnait chez moi ? J’aurais voulu pleurer encore mais j’étais à sec. Je me suis demandé combien de temps ça allait mettre pour passer. J’ai essayé de m’imaginer dans cinq ans, ou dans dix ; est-ce que je pourrais encore marcher dans la rue ?
Encore était-ce le meilleur scénario possible. Il y avait toujours le risque de se faire poisser.
J’ai poursuivi mon chemin. J’ai observé les gens qui rentraient du boulot. Ils étaient en costume, en tenue de travail, et ils montaient dans de chouettes bagnoles. Ils trimbalaient probablement un passé – des erreurs, des mauvaises actions qu’ils avaient commises. Tel était sans doute le lot de chacun. […]

Mais qu’est-ce qu’on était supposé faire avec ce poids ? Une fois qu’on l’avait sur soi ? Etre un homme, tout bonnement ? Prendre sur soi, et puis voilà ? Peut-être bien. Peut-être que c’était là le vrai test. Peut-être que c’était exactement ça qui faisait de vous un homme : avoir la capacité de fonctionner tout en ayant le pire secret en tête. Ce pour quoi tant d’hommes adultes semblaient si ridicules. Ils n’avaient jamais senti ce poids. Ils n’avaient jamais senti cette responsabilité. Ils n’avaient pas passé le test, n’avaient pas fait leurs preuves ; c’étaient des petits garçons en habits d’adulte.

Comme mon père.

Avis :

J’avoue que j’étais un peu sceptique en commençant ce livre ; ce fut toutefois une agréable surprise. L’auteur réussit à se mettre dans la peau de son protagoniste avec beaucoup de naturel : un garçon comme les autres qui se trouve un jour au mauvais endroit et au mauvais moment. C’est alors que sa vie bascule, tous ses points de repère sont bouleversés et il n’arrive plus à affronter les conséquences de ce que son acte implique. On parvient sans peine à imaginer le désarroi du narrateur et très vite, on se sent aussi paumé que lui. Le seul bémol pour moi, c’est la façon trop caricaturale dont l’auteur a traité un personnage comme celui de Jennifer (la petite amie du héros ; pour résumer : une bécasse qui ne pense qu’à se faire dépuceler), ce qui ressort d’autant plus que la psychologie du narrateur est à l’inverse très développée et soignée.
J’ai aussi beaucoup apprécié le choix original de la narration : la confession à la première personne et le sens qu’elle prend à la fin du livre. Mais je n’en dirai pas plus pour laisser aux éventuels lecteurs le plaisir du suspense… Quoi qu’il en soit, je conseille ce livre divertissant et efficace qui envisage assez justement les problèmes de l’adolescence, mais excelle aussi dans le traitement de la paranoïa.

Note :

Blake Nelson – Américain
187 pages – 2006 – ISBN : 978-2-253-12563-1