Résumé :

Être le fils de Romain Gary et de Jean Seberg est un lourd fardeau à porter. Dans ce récit intimiste, Alexandre Diego Gary nous fait part de l’errance qui a longtemps caractérisé sa vie. Entre le souvenir de ses morts et la dépression qui le guette sans cesse, le narrateur aux pseudonymes changeants revient sur les années sombres de son existence, l’écriture constituant à ses yeux une échappatoire paradoxale, entre nécessité et interdit.

Extrait :

J’aimerais commencer par une belle black de phrase, bien roulée, saphique et sophistiquée, une phrase que l’on aurait envie de caresser, contre laquelle on voudrait se blottir, se frotter, dont on souhaiterait épouser les contours. mais les circonstances, les Événements, ne le permettent pas. Et les mots qui vont surgir se révèlent plus prosaïques, plus pauvres que je ne l’aurais voulu. Ils ont toutefois le mérite d’aspirer à dire la vérité, sans fioritures, sans détour. Vérité que voici : ce n’est pas une vie, c’est une rature. Mon existence ressemble à une succession de mots rayés jusqu’au sang, biffés jusqu’à la moelle. Au point que le papier sur lesquels je les couche, sur lequel ils gisent, s’en trouve déchiré, troué par endroits. Ils forment un petit amas, un entrelacs de signes enserrés dans les barbelés d’encre qui les noircit jusqu’à les effacer, ou presque. Je les imagine autour de moi, enchevêtrés, tous ces mots nuls et non avenus, qui ne pensent, qui ne veulent rien dire. Ils m’entourent, m’enferment, m’emprisonnent, pareils à un petit camp de concentration fait sur mesure, pour me réduire au silence.

Avis :

L’extrait en 4ème de couverture et le début du livre (voir ci-dessus) m’ont séduite et donné très envie de me plonger dans cet ouvrage. Mais j’ai finalement assez vite déchanté : le livre se construit très explicitement autour d’une déchirure et du sentiment de la difficulté de vivre mais se complaire à ce point dans la dépression et surtout dans le récit sordide de frasques sexuelles sans fin, j’avoue que j’ai  eu du mal à en saisir l’intérêt. Par moments, le livre est très poignant et j’ai apprécié que ce ne soit pas  pour l’auteur un instrument pour dévoiler de façon indécente des éléments de la vie de ses parents. Les souvenirs s’inscrivent dans l’illustration d’une existence brisée, mais il n’y a pas grand chose pour contrebalancer ces geignements continuels. Je me suis vite lassée du narrateur et de ses confidences trop intimes. Je mesure bien toute la difficulté d’une telle démarche et le risque d’indécence qui lui est inhérent mais je n’ai pas du tout adhéré à ce masochisme exacerbé. De ce que j’ai lu dans une interview, ce livre a fait du bien à son auteur et c’est très bien pour lui, mais l’écriture-thérapie n’est pas toujours synonyme de réussite littéraire (loin s’en faut), ce qui fait que je reste sur ma faim.

Note : Alexandre Diego Gary (1963) – Français 170 pages – 2009 – ISBN : 978-2-07-012577-7