Résumé :

A treize ans, Tobie ne mesure pas plus d’un millimètre et demi. Terré dans un trou d’écorce, il essaie d’échapper à son peuple qui le traque. Parce que le père de Tobie, Sim Lolness, est un grand scientifique. Et les découvertes qu’il fait sur la possibilité que l’arbre soit un être vivant ne plaisent pas à ceux qui trouvent de l’intérêt dans l’exploitation de ses richesses. Au fil de la fuite de Tobie, on reconstitue petit à petit les éléments de son histoire : son enfance choyée dans les branches, ses moments privilégiés avec Elisha et toute une galerie de personnages qui chacun leur tour vont jouer un rôle important dans l’aventure extraordinaire de Tobie.

Extrait :

Tobie mesurait un millimètre et demi, ce qui n’était pas grand pour son âge. Seul le bout de ses pieds dépassait du trou d’écorce. Il ne bougeait pas. La nuit l’avait recouvert comme un seau d’eau.
Tobie regardait le ciel percé d’étoiles. Pas de nuit plus noire ou plus éclatante que celle qui s’étalait par flaques entre les énormes feuilles rousses.
Quand la lune n’est pas là, les étoiles dansent. Voilà ce qu’il se disait. Il se répétait aussi : “S’il y a un ciel au paradis, il est moins profond, moins émouvant, oui, moins émouvant…”
Tobie se laissait apaiser par tout cela. Allongé, il avait la tête posée sur la mousse. Il sentait le froid des larmes sur ses cheveux, près des oreilles.
Tobie était dans un trou d’écorce noire, une jambe abîmée, des coupures à chaque épaule et les cheveux trempés de sang. Il avait les mains bouillies par le feu des épines, et ne sentait plus le reste de son petit corps endormi de douleur et de fatigue.
Sa vie s’était arrêtée quelques heures plus tôt, et il se demandait ce qu’il faisait encore là. Il se rappelait qu’on lui disait toujours cela quand il fourrait son nez partout : “Encore là, Tobie !”. Et aujourd’hui, il se le répétait à lui-même, tout bas : “Encore là ?”
Mais il était bien vivant, conscient de son malheur plus grand que le ciel.
Il fixait le ciel comme on tient la main de ses parents dans la foule, à la fête des fleurs. Il se disait : “Si je ferme les yeux, je meurs.” Mais ses yeux restaient écarquillés au fond de deux lacs de larmes boueuses.

Avis :

Je suis tombée sous le charme de ce premier tome dès les premières lignes. La quatrième de couverture a beau indiquer “à partir de 10 ans”, je n’ai pas vraiment été gênée par ce label jeunesse. Le style est très soigné, touchant et poétique à la fois et l’auteur réinvente avec beaucoup de virtuosité certaines expressions familières comme “vieille branche” ou “tête de Truc”. De la même façon, il décrit les sentiments ressentis par les personnages à travers des métaphores simples, jolies et parlantes, qui m’ont fait ressentir beaucoup de belles émotions contradictoires à la lecture. L’univers somptueux dans lequel évolue Tobie, tantôt douillet, tantôt hostile, que nous découvrons au fur et à mesure de son errance, contribue aussi à la qualité de cette belle saga. La tension monte jusqu’à la fin : l’histoire foisonne de nouveaux évènements à chaque page, ce qui nourrit toujours notre envie d’en savoir plus. Un très beau roman à conseiller aux petits comme aux grands. Mon seul bémol concerne le personnage du méchant qui est terriblement caricatural (d’une bêtise et d’une méchanceté pathétiques), ce qui est dommage par rapport à la subtilité du reste.

Que de coups de cœur sur la toile : un grand merci à Leiloona pour cette belle découverte ; ses mots élogieux m’avaient convaincu : “tous les ingrédients d’un excellent livre : une histoire originale campée par des personnages attachants, un univers fouillé et crédible, mais aussi une manière poétique de voir le monde”. Libralato conseille vivement ce “chef d’œuvre littéraire” et Florinette a dévoré avec avidité cette magnifique histoire.

Note :

Timothée de Fombelle (1973) – Français
394 pages – 2006 – ISBN : 978-2-07-062945-9