J’ai découvert Emmanuel Carrère dans le cadre de cours de littérature contemporaine organisés au Lieu Unique à Nantes il y a trois ans. La séquence portait plus particulièrement sur L’adversaire mais abordait aussi le reste de l’oeuvre de Carrère, et la dernière séance a été l’occasion d’une rencontre avec l’auteur. La lecture de L’adversaire a été pour moi très bouleversante, sans doute parce qu’il s’agit d’une histoire vraie, mais aussi parce que dans ce livre, Carrère ne s’efface pas en tant que biographe mais assume l’intérêt qu’il a éprouvé pour le fait divers qu’il raconte, pour Jean-Claude Romand et la raison de ses agissements, établissant même des parallèles entre lui et Romand. Mais j’ai aussi été conquise par la personnalité d’Emmanuel Carrère, à la fois simple et sympathique, qui est venu nous parler très naturellement de ses livres (ah, si chaque découverte littéraire pouvait se solder par une rencontre avec l’auteur !).

Suite à cela, j’ai lu La classe de neige, roman que Carrère a écrit alors qu’il était dans l’impossibilité d’écrire sur l’affaire Romand mais que celle-ci le turlupinait. Un livre assez étrange, à l’atmosphère malsaine mais qu’il est intéressant de lire en parallèle avec L’adversaire parce qu’il en constitue une sorte de version fantasmatique.

L’intérêt de l’œuvre de Carrère, c’est aussi son acheminement progressif vers l’autobiographie. Le roman apparaît dans un premier temps comme un détour inévitable : j’avoue ne pas avoir lu les premiers mais La moustache, qui flirte avec le fantastique, s’oriente déjà clairement vers une réflexion sur l’instabilité de l’identité. Je suis vivant et vous êtes mort, qui est la biographie de l’auteur de SF Philip K. Dick se penche sur la relation poreuse que cet auteur avait établi entre sa vie et ses livres. Ce n’est toutefois qu’avec Un roman russe que Carrère entre de plein pied dans ce qu’on peut appeler de l’autofiction. Il analyse des événements de sa vie comme recelant un sens caché et tente d’en décrypter la signification à travers une quête qui relève autant du romanesque que de l’existentiel, ce qui fait que le lecteur se prend très vite au jeu. Plus récemment, D’autres vies que la mienne est écrit dans un style plus apaisé et sa dimension biographique en fait le pendant positif de L’adversaire.

En résumé :

Emmanuel Carrère, écrivain français né le 9 décembre 1957 (un sagittaire donc forcément un gars bien).

Oeuvres les plus connues : La moustache (1986), L’adversaire (1999) , D’autres vies que la mienne (2009)
Oeuvres conseillées (à lire de préférence dans cet ordre): L’adversaire (1999), La classe de neige (1995), La moustache (1986), Un roman russe (2007), D’autres vies que la mienne (2009)